Je n’écrirai plus dans Branchez-vous. Le portail vendu à Roger il y a deux ans a fermé ses portes sans préavis hier vers 14 heures. Je l’ai appris sur Twitter.
Je n’écrirai plus deux fois par semaine mes chroniques d’humeur sur la vie, l’amour, la mort, le temps qui passe, la coiffure de Stephen Harper, l’auto-satisfaction de Jean Charest, l’incompétence de Line Beauchamp, la folie au volant, la perte de l’insouciance, la fièvre acheteuse des consommateurs,… dans ce site qui a été le pionnier de l’Internet au Québec.
Je ne m’assoirai plus devant le téléjournal les lundis et les jeudis soirs à la recherche de la nouvelle qui fera bondir les habitués de ce site créé il y a plus de 15 ans par le visionnaire Patrick Pierra.
Je n’écrirai plus en imaginant les cohortes de lecteurs de Saguenay, Québec, Victoriaville, Gaspésie, Mauricie, Montréal, name it, parfois même Paris et Bruxelles, prêts à déverser leur fiel anonyme dans la tribune qui leur était offerte gratuitement.
Certes, les derniers mois le site avait fermé les commentaires qui souvent dérapaient, il y avait des bogues techniques qui empêchaient parfois mes textes de se retrouver en première page.
En 7 ans et 763 chroniques exactement, j’avais pris le tempo, je m’amusais à écrire parfois n’importe quoi mais jamais n’importe comment, je préparais des textes à l’avance pour prévoir les pannes d’inspiration, je me passionnais pour l’actualité parce que c’est un terreau fertile pour les mots, je m’imaginais un jour être repris par les journalistes qui font la revue de presse à la radio, mais ça n’arrivait jamais, je me réjouissais que certains de mes textes fassent le tour de la planète web, comme celui intitulé Je voudrais être un chien qui a été repris des centaines de fois dans des blogues, des sites des amis des animaux, des chaînes de lettres bien intentionnées, j’étais fier de petites réflexions anodines comme celle sur l’insouciance, je me gonflais de plaisir quand un ami ou, mieux encore, un ami d’ami me complimentait sur tel ou tel texte.
Je n’écrirai plus dans Branchez-vous parce qu’hier le site a été sauvagement fermé.
Ça me fait de la peine pour tous les collaborateurs qui y ont mis de leur cœur. Ça me fait de la peine pour toutes celles et tous ceux qui comptaient sur ce revenu régulier durement gagné. Ça me fait de la peine parce que Branchez-vous a été le premier portail web indépendant au Québec, qu’il a ouvert la voie à Canoë, Sympatico, Cyberpresse et que les gens ont tendance à vite oublier. Ça me fait de la peine pour la liberté de presse, parce que quand un média meurt, quel qu’il soit, c’est un peu d’ignorance qui gagne du terrain.
Heureusement, j’écrirai encore tous les jeudis dans Urbania et de temps en temps dans le Huffington Post. Parce qu’on ne peut pas empêcher une plume de vouloir s’envoler.
Si vous pouviez aussi ne plus écrire en utilisant toujours les mêmes techniques d’écriture, ça nous ferait des vacances. Parce que lire 763 chroniques, que ce soit sur Urbania, le HuffPost ou Branchez-Vous (ah non, plus là!), toujours construites de la même façon, ça ne donne pas envie de militer pour la survie de ces plateformes…
Vous êtes aussi libre de ne pas lire. Merci de votre commentaires.