Au cours de notre périple autour de l’Europe, nous avons traversé des pays qui n’existaient pas il y a 20 ans, rencontré des peuples tout neufs, visité des capitales moins grandes qu’un arrondissement de Montréal, franchi des frontières sans douanier… et dû expliquer mille fois que le Québec existait… mais n’existait pas.
Bien sûr, si vous dites que vous êtes du Canada, tout le monde saura d’où vous venez. Mais le Québec? De késsé? Wadesda? Un cas… nada! Inconnu au bataillon. Mystère géographique, peuple anonyme, abonné absent au rayon des nations. Un étonnement qui se conclut toujours par la question qui tue: « Mais pourquoi parlez-vous français si vous êtes canadien? »Ça fait quand même de la peine d’avoir parcouru tous ces kilomètres (près de 11 000) pour se rendre compte que si on veut être quelqu’un qui vient de quelque part, il faut dire qu’on vient du pays dirigé par Stephen Harper. Parce qu’évoquer le Québec déclenche à coup sûr un sourcil dubitatif, une moue interloquée et une grimace incrédule.
Ça valait la peine de produire Céline Dion, le Cirque du Soleil, des tramways et des métros qui circulent à Bruxelles, Dresde, Innsbruck, Bucarest, Athènes,…
S’il avait vécu en Slovénie, au Monténégro, au Liechtenstein ou au FYROM, Gilles Vigneault n’aurait pas dû chanter que son pays n’en était pas un.
La Slovénie est un joli petit pays de 2 millions d’habitants sympathiques qui a une vingtaine d’années d’existence. Sa capitale Ljubljana compte 280 000 Ljubljananais (je ne suis pas sûr que c’est exactement comme ça qu’ils s’appellent, mais c’est rigolo). Et on s’y sent bien comme dans un Mile End tricoté serré autour d’une rivière bordée de rues piétonnes.
Le Monténégro est un surprenant pays sauvage qui s’est séparé de la Serbie il y a peu, compte 600 000 habitants, sa capitale Podgorica en compte à peine 140 000 et les touristes commencent à y affluer par centaines de milliers.
Au Liechtenstein vivent 35 000 Liechtentintins (là encore je ne suis pas sûr que c’est exactement comme ça qu’ils s’appellent, mais c’est aussi rigolo) qui parlent suisse, habitent dans des chalets suisses, regardent des montagnes suisses et payent en argent suisse. Son existence n’est due qu’à une incongruité historique et à la volonté d’une famille princière plus entreprenante que les autres.
La FYROM (Former Yugoslav Republic Of Macedonia) a lâché récemment la Serbie et essaye désormais de se bâtir une identité propre en puisant dans son histoire.
Plus au Nord, la Tchéquie et la Slovaquie ont désuni pacifiquement leurs destins pour exister chacune de leurs côtés. Pourtant il y a entre elles bien plus de ressemblances qu’entre le Québec et le ROC (Reste du Canada).
En visitant tous ces pays (21 au total), j’étais un peu jaloux de leur existence.
Le Québec n’aurait rien à leur envier s’il jouait dans le concert des nations, s’il pouvait être maître de sa destinée, si son drapeau pouvait défiler aux manifestations sportives…
Bien sûr, il y a les aléas de l’histoire, les frustrations du passé, des mésententes, des guerres parfois, des gens pas contents, d’autres ravis, l’économie incertaine, l’identité fragile, la culture, la langue,…
Mais aujourd’hui, ces pays existent.
Et pas le Québec.
Pourquoi?
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Texte publié dans Urbania